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Maïmouna, bootythérapeute en mouvement

Ce n’est pas une femme comme les autres. D’abord, elle s’habille en rouge. Une contrainte dont elle a bien voulu une fois s’affranchir, mais elle est vite revenue à sa couleur fétiche. Maïmouna Coulibaly, c’est Rouge ! Point.

Et autant que vous le sachiez, si vous devez la croiser à une soirée ou à un événement quelconque, évitez le rouge intégral. Elle n’aime pas !

De prime abord, elle semble timide. Quand elle parle, et qu’elle cherche ses mots, sa bouche fait une moue presqu’involontaire, ses yeux se lèvent au ciel d’abord dans un sens et puis de l’autre côté, et elle réfléchit. Ça prend le temps qu’il faut. Ensuite elle parle avec précaution. Quand elle ne comprend pas, elle dit, « je ne comprends pas ».

J’ai eu l’occasion de travailler avec Maïmouna à la télé pendant plusieurs années. C’était sur Trace TV, pour Trace Africa, une émission hebdomadaire que nous tournions le plus souvent en pleine rue, à Château d’eau, le paradis des tresses africaines et autre tissage. Nous posions la caméra sur le trottoir parfois à la sortie du métro, et Maïmouna faisait ses lancements en dépit des allées et venues des passants nombreux dans ce coin. Nous enregistrions autant de prises que nécessaires. Parfois les badauds s’attroupaient.

Elle interviewait les stars du Ndombolo et du coupé décalé, souvent en pleine rue ou parfois chez elles (comme ce fut le cas du grand Mopao, Koffi Olomidé) ou dans les showrooms et les ateliers de Sadio Bee, Xüly Bet, designers de talent qui créent une mode aux couleurs d’Afrique et du monde.

Maïmouna avait déjà sorti son DVD de N’dombolo. J’ai appris plus tard, qu’elle avait commencé par être comédienne.

Elle avait aussi écrit des pièces de théâtre, comme Hé Mariamou, qui retrace le parcours d’une jeune fille de banlieue. Humour, réalisme, poésie, là encore, elle a pris les choses en main, pour tracer sa propre route. A l’époque de la télé, elle avait déjà commencé à donner des cours dans le Marais. Des cours de coupé décalé, de ndombolo ou de dancehall. Des cours, où les femmes (souvent, mais pas seulement) se défoulent en bougeant leur booty, leur derrière, leur postérieur, leurs fesses.

A l’époque, elle n’avait pas encore donné un nom à ce qui allait devenir la Booty Thérapy.

Bouger ses fesses est libérateur.

Maïmouna est une acharnée. Le genre de fille qui ne lâche pas l’affaire. Ça se voit, ça s’entend. Dans sa « classe », sa voix se fraye facilement un chemin parmi les notes de musique qui font péter les enceintes.

Aujourd’hui, Maïmouna a déposé la marque de Booty Thérapy. Elle a créé une franchise. Sa danse est libératrice. Il suffit pour s’en convaincre, d’assister à ses cours ou aux spectacles qu’elle organise où des femmes, ses élèves après avoir dansé sans retenue expliquent tout le bien que cela leur fait.

Ça me rappelle les dancehall queens en Jamaïque, qui dans les boites de nuit, participent au dancehall queen contest, sans que jamais le regard des autres ne pèse sur elles ! Sans manière, sans chichi, elles bougent, se mettant parfois sur la tête pour écarter les jambes dans un grand écart aérien qui choquerait bien entendu les empêcheurs de danser en rond !

La dernière fois que j’ai vu Maïmouna et que je l’ai interviewée c’était dans un théâtre à Montreuil. (la vidéo est plus haut)

Elle jouait dans « L’apathie pour débutants », une pièce du suédois Jonas Hassen Khemiri, mise en scène par Virginie Berthier. Une affaire d’enfants immigrés touchés par une curieuse apathie et par les préjugés. Une pièce inspirée d'une histoire vraie qui s'est déroulée en Suède au début des années 2000. Sur scène, cinq comédiens interprètent plusieurs personnages : les enfants, les fonctionnaires, les politiques dont certains ont trahi leurs valeurs. Maïmouna y est étonnante de vérité.

Elle n’a pas l’air de transiger avec ses propres valeurs. Etre qui elle veut être, en dépit des regards, des préjugés, des amalgames. Son regard franc est aussi parfois un peu triste. Un jour, dans pas longtemps, elle écrira tout ça. Pour l’instant, elle se libère en bougeant les fesses dans la joie et le dépassement… et elle emmène avec elles des centaines de femmes qui veulent la même chose… et elle crée une franchise… et elle joue la comédie… et elle se fait filmer aux Etats-Unis…Et elle dit volontiers qu’elle crée pour ne pas crever.

Barbara Jean-Elie

Sa page facebookIci

 

 

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